Un départ magique !

Ce dimanche 17 juillet, les 117 concurrents de la Drheam Cup / Grand Prix de France de Course au Large, répartis en dix catégories se sont élancés sans encombre de Cherbourg-en-Cotentin en début d’après-midi, par un temps de rêve et dans une brise de secteur Est d’une quinzaine de nœuds. Difficile d’imaginer conditions plus merveilleuses. Récit.

7 heures 15. Dès potron minet, les pontons de Port Chantereyne s’animent doucement mais sûrement.
8 heures. Sur la panne où sont stationnés notamment les bateaux IRC, l’on croise des équipages amateurs, en famille ou entre amis, et dormant à bord, finissant de prendre le petit déjeuner en terrasse dans le cockpit. Reste à faire une ultime vaisselle, débarquer sacs de couchages et cirés de gros temps, puis remettre le bateau en configuration course. Sur celle des Class40 et Ocean Fifty, les préparateurs sont déjà sur le pont, les skippers derrière leur ordinateur à étudier les derniers fichiers météo, suant sur le timing du passage d’un probable front au Fastnet. Les plongeurs passent un dernier coup d’éponge sur les carènes, et les équipes techniques ramènent au camion des caisses à outils format XXL.
9 heures 30. SVR Lazartigue skippé par Tom Laperche en l’absence de François Gabart souffrant de la Covid, fait son entrée dans la grande rade de Cherbourg-en-Cotentin volant à 25 nœuds. Jacques Civilise, créateur de la Drheam Cup va à la rencontre du seul Ultime engagé saluer l’équipage.
11 heures. Les pontons sont désormais bondés. C’est les vacances, et nombre de marins ont passé cette semaine festive dans la cité cherbourgeoise en famille. Le moment de la séparation approche.
11 heures 40. Un ferry rentrant par la passe Est, semble saluer la flotte encore sagement amarrée. Les digues sont noires de monde. Le ballet des bateaux quittant leur appontement démarre, et même si c’est l’étale de pleine mer, certaines manœuvres de port sont un peu « rock n’roll ».
12 heures 15. Tout le monde est sur l’eau grand-voile haute. Pause casse-croute avant les procédures de départ.
13 heures 30. Le PSP Flamant de la Marine Nationale et dont le port d’attache est ici à Cherbourg-en-Cotentin, est mouillé au milieu de la ligne et sert de bateau comité de course pour le départ.
13 heures 50. La majorité des équipiers pour celles et ceux naviguant en solitaire ont maintenant quitté le bord et sauté dans des semi-rigides. Le vent est plutôt oscillant, soufflant à 15 nœuds sur une mer plate.
14 heures. Premier des trois départs avec une précision suisse pour les Ultimes, Ocean Fifty, IMOCA, Grands Monocoques, Rhum Monos. Thibaud Vauchel-Camus (Solidaires en peloton Arsep) coupe la ligne en tête et la flotte des Ocean Fifty file groupée à plus de 28 nœuds après avoir viré la bouée de dégagement Urville. SVR Lazartigue (Tom Laperche) vole lui à plus de 40 nœuds alors que le vent semble se renforcer.
14 heures 20. Le second départ est donné pour les Rhum Multi, Class40, Multi 2000. Antoine Carpentier sur son Class40 Redman est le premier à s’extirper d’une flotte très compacte. La bagarre est lancée dans cette flotte de 36 unités déchaînées.
14 heures 40. Troisième et dernier départ pour les Figaro 3, IRC équipage et double. Une fois encore, le spectacle est grandiose. Le jeune Basile Bourgnon (Edenred) sur son Figaro 3 se porte en tête.
15 heures 15. Les 118 concurrents filent désormais au portant vers le Sud de l’Angleterre et West Shamble. Les spis sont de sortie. Pas de répit. Le « channel » va être avalé en moins de trois heures pour les premiers, mais il va falloir veiller aux cargos et autres ferries nombreux sur le parcours… Pour la sieste dominicale, il faudra sans doute patienter.

Ils ont dit :

Patrice Carpentier (JPK 960 – Groupe 5 Sarl – IRC double) : « Je navigue avec mon « vieil » ami Pascal Jamet, sur ce parcours que j’adore. Tant que je peux régater, je ne suis pas rassasié. J’ai disputé la première Whitbread (course autour du monde en équipage) il y a cinquante ans, et depuis je n’ai jamais cessé. Là je viens de faire 7 500 milles en deux mois, soit un aller-retour Bretagne Martinique, et donc cette Drheam Cup dans ces conditions idylliques, va être la cerise sur le bateau comme aime dire Loïck Peyron. »

Tiphaine Ragueneau (Figaro 3 – Tiphaine Ragueneau-Objectif solitaire 2023 – double) : « La dernière soirée (hier samedi) a été assez tranquille. On s’est couché tôt pour bien se reposer. Ce matin, nous avons regardé les derniers fichiers météo, et on devrait « démancher » assez vite. A partir de demain soir lundi, la situation risque de se compliquer avec des fronts orageux. On devrait passer tous les waypoints et les zones un peu tactiques et douloureuses de nuit. En qui concerne les quarts, on va essayer d’être rigoureux et alterner deux heures sur le pont et deux heures de repos, afin d’être à notre meilleur la nuit. Je suis vétérinaire, dispute ma première Drheam Cup, et c’est seulement la seconde fois que je navigue en double avec Paul (Medinger) »

Corentin Douguet (Class40 – Queguiner-Innoveo – solitaire) : « Cherbourg-en-Contentin est une belle ville pour faire la fête, mais je suis resté dîner tranquille à la maison. Dès le petit déjeuner, je me suis plongé dans les fichiers météo. La traversée de la Manche va être rapide au reaching sous gennaker, puis sous spi jusqu’au cap Lizard. Ensuite, il va se passer beaucoup de choses pour monter au Fastnet, avec des transitions assez complexes, et pas mal de vent ensuite au portant, ce qui en solitaire n’est jamais un exercice facile. Depuis ma première course sur ce bateau (il a gagné la 1000 milles des Sables), le plateau a plus que doublé (36 concurrents), avec de redoutables marins… »

Christophe Bogrand (Multi 2000 – Château du Launay – solitaire) : « C’est fantastique de prendre le départ de cette Drheam Cup sous le soleil et avec la météo qui s’annonce. Je suis un pur amateur, passionné de mer depuis mon plus jeune âge. C’est pour moi l’opportunité de m’entraîner seul en vue de la Route du Rhum, mais aussi de me confronter à d’autres bateaux de tout type, et parfaire mes gammes. Mon trimaran de 41 pieds (12,80 m) est un plan Dick Newick en bois époxy, construit il y a exactement 40 ans chez Le Jéloux à la Trinité-Sur-Mer. C’est un bateau qui est resté dans son jus mais que j’entretiens et bichonne. Je l’aime et ait un plaisir fou à naviguer à bord de ce multicoque ayant un ADN que je ne retrouve pas sur les autres bateaux plus récents. »

Quentin Vlamynck (Ocean Fifty – Arkema – solitaire) : « C’est ma première course en solitaire sur ce bateau lors de cette Drheam Cup / Grand Prix de France de Course au Large, et l’objectif est d’arriver à la Trinité-Sur-Mer afin de me qualifier pour la Route du Rhum-Destination Guadeloupe. Il y a un super plateau. J’ai hâte. Nous allons partir très vite, et quatre heures plus tard, nous devrions être de l’autre côté de la Manche après un bord direct à 110 degrés du vent. Ensuite, si tout se passe bien, nous serons sous gennaker jusqu’au Fastnet. Je suis routé par le météorologue Eric Mas en collaboration avec les coureurs Alex Pella et Lalou Roucayrol, ce qui va être un bon exercice pour la Route du Rhum. Je vais aussi profiter de ces bords de portant à haute vitesse pour m’habituer à dormir sous pilote, ce qui n’est pas toujours simple. Je n’ai pas encore de repères. Hier, je me suis couché très tôt. J’avais besoin de dormir. La semaine a été dense, et il y a une semaine, nous étions encore en course au large du Fastnet ! »

Oren Nataf (Multi 2000 Rayon vert/double) : « Cette Drheam Cup / Grand Prix de France de Course au Large est la dernière étape de ma formation pour le solitaire dans l’optique de la Route du Rhum. C’est la dernière passation avec Sidney Gavignet (quatre courses autour du monde notamment) qui me prépare techniquement et psychologiquement depuis deux ans et qui dispute cette belle course avec moi. J’ai acheté ce Pulsar 50, plan Erik Lerouge ayant disputé deux fois la Route du Rhum. Je suis un amateur, et il y a dix ans, je n’étais jamais monté sur un voilier. Je suis dans l’inconnue et j’ai toujours la boule au ventre quand je pars en mer. »